Les archives

21 mars de l'an zéro :

Selon les désirs des habitants de l'île, les bienfaiteurs descendirent de la montagne, ils se présentèrent Akuyô et Daraku. Ils offrirent la source rouge, mémoire des paroles oubliées et dirent :

"Celui qui, en ce jour, versera son sang dans la source rouge, acceptera de servir et d'obéir à nos personnes qu'il nommera dès lors Reihô ou Reine Akuyô et Roi Daraku. Il nous offrira sa descendance et la descendance de sa descendance et ce pour l'éternité. Cet individu acceptera de vivre sous notre règne, se conformant à nos lois. Il reconnaîtra notre parole comme la Parole Suprême et il s'y pliera sans objection. Il reconnaîtra nos pleins pouvoirs. Tout manquement à ces termes par la révolte -soit un refus d'écouter ou de se soumettre- résulterait à la trahison. La source rouge châtiera les traîtres, dans la seconde même de leur méfait, par la mort ou pire.

- En échange, celui qui, en ce jour, versera son sang dans la source rouge, aura l'honneur de nous voir et -si ses intentions sont pures et respectueuses- de nous toucher toutes les six lunes. A cette occasion, il lui sera autorisé de faire une demande que nous nous gardons le droit de refuser. En cas de refus, il lui sera autorisé de formuler une seconde demande, sans quoi, il devra attendre six nouvelles lunes."

Seules dix familles refusèrent de verser leur sang, tenant ces propos :
" 'Vivez votre vie selon vos désirs et selon les choix que vous jugerez justes', fut votre tout premier conseil. Nous le suivons encore aujourd'hui et c'est pourquoi nous refusons de verser notre sang."

21 mars de l'an trois :

Les Nushi sont descendus de la montagne avec les Reihô. A cette occasion, tous les habitants de l'île -y compris les dix familles hors serment- se sont réunis au pied de la montagne.
"Nous vous présentons nos enfants, veuillez veiller sur eux. Vouez leur vos vies, servez les et protégez les, comme vous nous l'aviez promis."
La demande fut acceptée par le peuple. Quand aux dix familles, elles ne se prononcèrent pas.

22 mars de l'an quatre :

"...Votre monde était parfait. Vous y viviez en harmonie. Vous y étiez nés libres et heureux mais cela ne vous convenait pas. Vous avez brisé le cercle naturel, vous avez détruit l'utopie, et vous en avez souffert. Votre détresse nous a éveillés, nous vous avons aidés. Tout s'arrangeait mais cela ne vous suffisait toujours pas. Vous en vouliez encore plus. Vous vouliez nous voir et pour cela vous avez accepté nos conditions alors qu'elles étaient tout à fait inacceptables. Oui, pour un simple caprice vous avez -sans réfléchir- sacrifié votre liberté et celle de vos descendants à nos personnes ; à nous qui vous sommes inconnus. Vous payerez vos erreurs. Par votre confiance aveugle vous vous êtes condamnés. A présent souffrez, pleurez, regrettez... entre nos mains et celles de nos enfants."

Les Reihô ont révélé leur véritable nature. Les humains réalisèrent leurs erreurs : eux qui pensaient que leurs seigneurs seraient bons et qu'ils les traiteraient avec respect, ne pensant qu'à leur bonheur, comprirent qu'ils avaient cru ce qu'ils avaient eu envie de croire. Oui, ils avaient commis une grave erreur, et ils ne pouvaient s'en sauver. Ils étaient à la merci des Reihô, leur seul espoir ? Les dix familles qui ont refusé de leur prêter serment : les Seii.

22 avril de l'an quatre :

Les Seii ont disparu ne laissant qu'un message derrière eux :

"Vous avez commis une erreur. Par votre insatiabilité vous avez fait de nos bienfaiteurs des tyrans, de leurs enfants vos maîtres, et à présent vous espérez faire de nous vos sauveurs ? Nous refusons. Jamais un maître ne nous sera imposé. Jamais nous ne serons utilisés. Nous sommes nés libres, nous le resterons ! Ceux qui voudront nous soumettre, n'y parviendront jamais ! Nous ne craignons ni la souffrance ni la mort si c'est pour défendre notre liberté!"
Les humains par cette disparition ainsi que cette déclaration virent leur seul et unique espoir réduit à néant.

L'an mille six cents vingt, de nos jours :

En l'an six cent les Reihô, lassés de régner, mirent en place un nouveau titre : les Kôshi. A partir de cette date les ordres provenant des majestés se raréfiaient. Pourtant le roi et la reine restaient présents et contrôlaient encore tout ce qui se passaient à travers les Kôshi qu'ils manipulaient. Puis petit à petit les Princes gagnèrent en indépendances. A partir de l'an sept cent les Majestés devinrent silencieuses ; liées au serment zéro, elles descendent toujours toutes les six lunes -elles se montrent, conversent, accordent des souhaits ou en refusent- mais en dehors de cette date, c'est le silence radio.
Les humains ont retrouvé un semblant d'espoir : les Seii vivent parmi eux. Ils en ont eu la preuve mais seront-ils aidés pour autant ? Les Seii accepteront-ils de détrôner les Reihô ? Et ces derniers briseront-ils leur silence afin de reprendre le pouvoir ? Ce silence, cache-t-il quelque chose ?